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Trois lettres à partager

Christophe Dauzac
Kinésithér Scient 2018,0604:01 - 10/12/2018

La maîtrise par le patient de ses données de santé suppose qu’il y ait accès et qu’il puisse les utiliser. Il ne sera pas le seul, puisque ses informations médicales seront désormais mises à disposition des professionnels de santé par le DMP, s'il a donné son consentement.

Depuis que l'idée est née en 2004, il aura fallu la volonté de 5 ministres et plusieurs lois pour qu’un carnet de santé devienne numérique... Toutes ces années étaient peut-être nécessaires pour que les conditions minimales pour l’utilisation du DMP soient opérationnelles (carte CPS, lecteur de carte Vitale et ordinateur). Si, en 2007 [1], une large majorité des médecins était favorable au principe du DMP, peu d'entre eux y étaient préparés. Un effort de formation et d'information spécifique était réclamé (84,5 %), considéré comme nécessaire pour donner confiance en l'outil. Les kinésithérapeutes n’avaient pas été interrogés.

La preuve par trois

Le dossier médical initialement personnel a changé d’appellation, il est devenu partagé ; il est en fait les deux. Non obligatoire, il est particulièrement à recommander aux patients atteints de pathologies chroniques. Il devrait permettre d’éviter les redondances inutiles d’examens, d’analyses biologiques et de prescriptions ainsi que la iatrogénie médicamenteuse. Le DMP devrait favoriser la coordination, la qualité et la continuité des soins entre tous les professionnels de santé, en ville comme à l’hôpital.

Sur trois lettres reposent les aspirations de tous les acteurs : le patient qui veut être bien soigné, les professionnels qui gagneront en précision et perdront moins de temps, la Sécurité sociale qui devrait réaliser des économies grâce à des soins plus rationnels.

Pour cela, les documents courants téléchargeables sont répartis dans de nombreuses rubriques : traitements et soins, comptes rendus, imagerie médicale, biologie, certificats, déclarations et données de remboursement y sont clairement identifiées.

Le kinésithérapeute y a-t-il sa place ? Dans le cadre d’un compte-rendu ou d’une fiche de suivi de soins « par auxiliaire médical », ou bien dans la rubrique « réunion de concertation pluridisciplinaire ». L’espace « prévention » peut contenir les comptes rendus d'actes diagnostiques à visée préventive ou de dépistage, ainsi que ceux qui concernent les actes thérapeutiques à visée préventive. Il y a donc maintenant une place pour que le kinésithérapeute « écrive » et rende traçable, pour le patient et les autres professionnels, ce qui restait jusqu’à présent rangé dans les logiciels patients.

Pour le patient, accéder à son dossier n’est pas si simple : un identifiant de connexion « à vie » qu’il faut mémoriser, un mot de passe que l’on choisit et un code d’accès unique à recevoir au moment de la connexion... C’est le prix de la conservation sécurisée de données très personnelles et de la mobilité : où que l’on se trouve, le dossier est consultable.

À l’heure où le patient participe au choix thérapeutique, on peut regretter que le système, géré par l’Assurance maladie, lui permette de bloquer les professionnels de son choix, de masquer certains documents, voire de supprimer son DMP.

Espérons que chacun en fera bon usage. L’exercice en réseau se développant, comment ne pas considérer que le DMP fera très certainement tomber des cloisons entre les professionnels pour un meilleur un parcours de soin pour le patient ?

[1] Hurtaud A, Dépinoy D. Dossier médical personnel : qu'en pensent les médecins ? Une enquête auprès des médecins de l'agglomération de Reims. UFR de Reims 2007 Juin;Vol. 3;n° 6.


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