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Rééduca propose ses premières conférences en ligne

Sophie Conrard et Jean-Pierre Gruest
- 19 octobre 2020

Pour pallier l'absence de salon cette année, en raison de la crise sanitaire, Rééduca organise des conférences en live sur Instagram, Zoom et Youtube. Les premières ont eu lieu jeudi, vendredi et samedi derniers, aux dates auxquelles le salon était initialement prévu. En voici un compte-rendu.



C’est Grégoire Gibault, alias le médiatique Major Mouvement, qui a commencé jeudi, avec une intervention très décontractée suivie par 650 personnes, dans laquelle il a expliqué comment, à l’heure de l’EBP (evidence-based practice), proposer les bons exercices à vos patients. Durant 45 minutes, il a présenté via Instagram un extrait de la formation qu’il dispense depuis 2 ans, baptisée "100 exos pour vos patients". "D’habitude, je fais beaucoup de vulgarisation scientifique pour le grand public, notamment pour valoriser la profession, mais là c’est vraiment avec ma casquette de kinésithérapeute que j’interviens, pour redonner la place aux exercices actifs pour nos patients", a prévenu l’enseignant en thérapie manuelle, qui promeut "une vision non dogmatique de la kinésithérapie" et une pratique reposant sur l’EBP. Sauf que 30 % des confrères qui suivent sa formation ignorent ce dont il s’agit : "Pendant longtemps, on a eu une approche empirique en kinésithérapie, en associant un traitement à un diagnostic. Or en s’appuyant sur la littérature scientifique, on s’est rendu compte que dans la durée, ces traitements n’étaient pas forcément viables…"

L’EBP monte en puissance depuis 15 ans :"Il s’agit d’une triade associant ce que dit la littérature scientifique, l’expérience du praticien et le ressenti du patient. La vérité scientifique serait au point de jonction de ces 3 points-là et il est important de les avoir toujours en tête. Par exemple, si on propose à un patient le meilleur des traitements en respectant la littérature scientifique mais sans prendre en compte son ressenti, cela ne sera pas efficace. C’est ce que l’on appelle l’alliance thérapeutique, qui consiste à trouver un protocole de traitement qui lui convient, avec lequel on se sent à l’aise et qui respecte les dernières études scientifiques", a-t-il expliqué. Le kinésithérapeute doit systématiquement s’interroger sur ce que "le patient est pour moi : est-ce qu’il présente des drapeaux rouges qui nécessitent de le renvoyer chez son médecin pour d’éventuels examens complémentaires, et si ce n’est pas le cas, qu’est-ce que je peux faire pour lui ?".

Laurence Gaborieau, directrice du salon Rééduca,
a inauguré cette première session en live sur Instagram.

Grégoire Gibault a expliqué avoir conçu sa formation de façon "très pratico-pratique pour ne pas être dans la continuité des études, qui sont plutôt orientées sur une pratique hospitalière ou en centre de rééducation". Le but est de "répondre aux problématiques de l’exercice libéral, en faisant en sorte que le kinésithérapeute puisse choisir le bon exercice pour le bon patient au bon moment". Considérant que, statistiquement, les patients ayant un problème de dos représentent le gros de la patientèle d’un kinésithérapeute libéral, une bonne partie de sa formation répond à cette problématique, en insistant sur l’importance du bilan. "C’est indispensable, pourtant il semblerait que 75 à 95 % des confrères n’en font pas. Or plus on fera de bilans, plus on pourra prétendre à revaloriser nos actes", a-t-il insisté.

"Mieux vaut un exercice pas parfait mais fait, qu’un exercice parfait oublié".
Au-delà du diagnostic médical, le kinésithérapeute doit demander au patient ce qu’il ressent et éliminer d’éventuels drapeaux rouges. Grégoire Gibault a un moyen mnémotechnique pour cela : "TIN TIV" : "T pour traumatique (est-ce que vous êtes tombé, chute ou choc ?), I pour infectieux (est-ce que vous avez de la fièvre, une perte de goût, d’odorat… ?), N pour neurologique (est-ce que vous ressentez une perte de force, de sensibilité, une irradiation, une douleur à l’éternuement, à la défécation, au mouchage ?), T pour tumoral, en cas de fatigue importante et de perte de poids sans motif (-6 kg sur 1 an sans augmentation de la dépense énergétique et sans restriction de l’apport nutritionnel), I pour inflammatoire (pour savoir si on est en présence d'une pathologie de type polyarthrite rhumatoïde ou spondylarthrite ankylosante, ou plutôt sur une inflammation cicatricielle post-traumatique, donc une inflammation locale) et V pour vasculaire", a-t-il énuméré.

"Une fois que c’est fait, il faut chercher ce qui reproduit les symptômes pour identifier la pathologie", a-t-il expliqué. Ce qu’il a illustré en s’appuyant sur les cas de 2 patientes vues le matin même, souffrant de séquelles de lumbago et présentant le même tableau clinique et la même symptomatologie, à savoir un blocage dans le bas du dos quand elles se penchent en avant.

Et surtout, il a insisté sur le fait qu’"il vaut mieux donner aux patients 2 exercices qu’ils sont capables de faire et sur lesquels ils vont être en réussite plutôt que d’en donner trop, qu’ils auront peur de mal les faire. Mieux vaut un exercice pas parfait mais fait, qu’un exercice parfait oublié !".

Sport et périnée : des alliés
Le vendredi à 12h15, les habitués de Rééduca avaient rendez-vous avec Princesse Périnée, Sabrina Fajau à la ville, pour une session sur "sport et périnée" : font-ils bon ménage ? Quelle activité conseiller à quel type de sportive ? Comment réaliser un bilan de la sphère abdomino-périnéale ? Suivie par 50 000 personnes sur Instagram et Youtube, où elle propose régulièrement des vidéos pédagogiques, cette kinésithérapeute est habituée à répondre aux questions de ses patientes de façon claire et décomplexée, et s'efforce de déconstruire les idées reçues et les tabous en matière de pelvipérinéologie.

Que dit la science sur le sujet ? "La sédentarité et le sport de haut niveau ont à peu près le même impact négatif en termes de compétence périnéale (à ne pas confondre avec la force périnéale), sachant qu'il existe d'importantes différences selon le sport pratiqué, évidemment", a-t-elle rappelé en introduction. Le sujet est d'autant plus important que "bon nombre de jeunes sportives de haut niveau ne sont pas bien accompagnées sur ce plan", estime la kinésithérapeute.

Tout commence par le bilan de la cavité abdomino-périnéale. "Faut-il pour autant bilanter toutes les sportives ? ça peut coûter cher à la Sécu, mais en termes de santé publique, ce n'est pas une mauvaise idée", s'est-elle interrogée avant de donner plusieurs conseils pratiques aux kinésithérapeutes qui ont suivi cette session, sur la façon de réaliser ce bilan. Elle a par exemple rappelé que la patiente ne devait pas rester allongée sur la table toute la durée du bilan, ce qui ne reflète pas sa pratique sportive. Sabrina Fajau a ensuite détaillé la réalisation du bilan respiratoire.

Selon elle, "tous les problèmes doivent être traités par le kinésithérapeute, même si la patiente est une sportive de haut niveau qui pratique un sport à impact à haute dose. Elle doit pouvoir pratiquer son sport sans problème, sans rien s'interdire. Elle a le droit de faire du sport et le sport est l'allié de son périnée", a-t-elle insisté, mentionnant également l'importance de "l'éducation périnéale", en parallèle de la rééducation.

À ceux qui ne sont pas spécialisés en pelvipérinéologie, elle recommande d'avoir les coordonnées d'un confrère qui l'est, chez qui adresser leurs patientes sportives si besoin. "Quant aux kinés du sport, ils doivent avoir des notions sur le périnée, c'est essentiel !"

D'autres sessions à venir
Le samedi matin avaient lieu 2 conférences, l'une sur l'accès direct au cabinet des kinésithérapeutes pour les patients lombalgiques, animée par Xavier Dufour, directeur de l'ITMP, l'autre sur la prise en charge pluridisciplinaire des femmes opérées d'un cancer du sein, présentée par Jocelyne Rolland, dont c'est la spécialité (elle a créé le site www.sereconstruireendouceur.com et est la marraine du réseau des kinésithérapeutes sénologues : www.reseaudeskinesdusein.fr). Elle était accompagnée d'un chirurgien sénologue et d'une patiente experte, Éléonore Piot de Villars, qui a fondé l'association Lympho'Sport qui informe et accompagne les malades pendant et après leur traitement.

D'autres sessions seront organisées, du 12 au 14 novembre et du 10 au 12 décembre, les jeudi et vendredi de 12h à 14h, et le samedi de 10h à midi. Plus d'infos ici.

Ces interventions sont disponibles en replay sur les comptes Instagram des intervenants, et le seront bientôt sur le site de Rééduca.

© D.R.

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