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L

a réforme qui réorganise les études de notre

profession, selon le principe universitaire

européen LMD, a abouti. A n de s’adapter à des

standards européens, désormais, 8 semestres

d’études organisés en deux cycles, suivront les

nouvelles modalités de sélection : une première

année commune aux études de santé validée ou

une première année de licence. La modernisation

de notre formation initiale devenait nécessaire

pour intégrer un cursus d’enseignement supérieur.

Un schéma LMD prévoit cependant trois diplômes,

convertis en crédits européens. Mais s’agissant de

notre profession, ce sera toujours le diplôme d’État

qui attestera des compétences pour exercer ; il sera

désormais obtenu après capitalisation de 240 Ects.

La refonte du programme laisse à penser qu’un

professionnel d’un nouveau genre verra le jour

dans 4 ans. Bâti en référence à la notion de compé-

tence, le programme est centré sur l’appropriation

des savoirs ; il aurait plu à Galilée «

On ne peut rien

enseigner à autrui. On ne peut que l'aider à le décou-

vrir lui-même.

», ou encore à de Saint-Exupéry : «

Le

véritable enseignement n'est point de te parler mais

de te conduire.

». Centrer l’apprentissage sur l’étu-

diant plutôt que sur la discipline ou la matière fait

prendre un risque de reléguer les savoirs au second

plan. Un équilibre est à trouver pour ce nouveau

duo compétences-connaissances. D’autant qu’«

une

connaissance générale est presque fatalement une

connaissance vague.

». Bachelard nous demande

donc d’approfondir et de rester vigilants.

La lecture du contenu de certaines unités d’ensei-

gnement surprend. Bloy n’a pas tort : «

On devrait

fonder une chaire pour l'enseignement de la lecture

entre les lignes.

».

En e et, quels usages les futurs praticiens feront-

ils des heures de cours in ationnistes de « Santé

publique, d’anthropologie, ou encore de sciences de

l’éducation » ? Alors que des pans de connaissances

ont été drastiquement réduits, notamment en ana-

tomie et en cinésiologie ! Les sciences humaines et

les sciences sociales seront certe utiles aux étudiants

pour construire leurs connaissances, mais quid des

disciplines qui font le cœur du métier ? Rappelons à

toutes ns utiles que le kinésithérapeute est attendu

sur le terrain clinique.

Les écoles vont-elles rendre le jeune professionnel

autonome, en lui présentant au cours de sa formation

la traumatologie comme « pathologie du champ mus-

culo-squelettique » ? ou bien une plaie cutanée comme

une e raction « du champ tégumentaire » ? Les spécia-

listes de médecine et de chirurgie vont-ils s’accommo-

der de ce jargon ? Voltaire ne comprendrait pas mais

sait nous éclairer : «

Chaque science, chaque étude, a son

jargon inintelligible qui semble n’être inventé que pour en

défendre les approches.

». Merci pour la leçon !

Nous en retiendrons une autre : «

Qui apprend la

science et ne pratique pas ce qu'elle enseigne, res-

semble à celui qui laboure et qui ne sème pas.

» : sou-

haitons que les étudiants aient à cœur de retenir cet

aphorisme ! Le nouveau programme permettra en

e et de développer l’initiation à la recherche et à la

production scienti que.

L’utilisation des nouvelles technologies ne seront pas

oubliées au cours des études : certi cat informatique,

technologie de l'information et de la communication

pour l'enseignement (TICE), e-learning se confronte-

ront à la transmission des savoirs par le « maître ». «

La

science, c'est ce que le père enseigne à son ls. La tech-

nologie, c'est ce que le ls enseigne à son papa.

» Serres

qui ré échit et analyse notre société, nous incite à

ne pas inverser les rôles et à ne pas négliger celui de

l’enseignant qui selon moi doit rester prépondérant.

Gide n’a-t-il pas raison lui non plus en disant : «

Un bon

maître a ce souci constant : enseigner à se passer de lui.

».

Montaigne aurait dû participer à l’élaboration du

nouveau programme. Ce ne sont pas uniquement les

contenus techniques et les présentations pédago-

giques qui permettront de progresser dans le métier.

S'il y avait un seul conseil à prodiguer à l’étudiant,

ce serait celui-là à appliquer au quotidien : «

Mon

apprentissage n'a d'autre fruit que de me faire sentir

combien il me reste à apprendre.

».

Nous retrouvons pour la dernière fois Jacques Vaillant

pour sa 221

e

rubrique « Ostéo-articulaire » (p. 35). La

Rédaction le remercie chaleureusement d'avoir contribué

pendant 20 ans à informer les lecteurs demanière

pertinente sur l'évolution des sciences et des techniques

concernant l'appareil locomoteur.

KS

n°568 - septembre 2015

Lire entre les lignes,

tout un programme !

ÉDITORIAL

Christophe DAUZAC

Rédacteur en Chef