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À la frontière

Christophe Dauzac
Kinésithér Scient 2019,0611:01 - 05/07/2019

La DREES prévoit que l’offre de médecine générale continue de baisser alors que le nombre de kinésithérapeutes, lui, va croître exponentiellement, tout comme le vieillissement de la population [1]. On pourrait penser que c’est une opportunité à saisir : les personnes âgées seront donc bien soignées par un nombre suffisant de kinésithérapeutes. Cependant, on sait aussi que le nombre de patients qui n’a accès qu’à 2,5 consultations médicales par an va augmenter. Qui alors va prescrire la kinésithérapie ?

Répondre à la croissance des maladies chroniques liées à l’avancée en âge avec moins de professionnels de santé est une gageure pour les années à venir.

Les ressources humaines sont au cœur de la réflexion. Les missions de chacun sont amenées à évoluer.

Actuellement, proposée par un médecin, la prescription de kinésithérapie, déclenche l'application du plan thérapeutique. Nous partageons ainsi la responsabilité avec le prescripteur. Nous proposons et réalisons le traitement sans être pour autant responsables des prescriptions qui nous sont adressées. Une évolution législative récente précise qu’en cas d’urgence, nous sommes habilités à accomplir les premiers actes de soins nécessaires, le patient étant alors remboursé.

Le diagnostic médical est bien sûr nécessaire ; le diagnostic kinésithérapique, celui des conséquences de la maladie, ne l’est pas moins. Arrêtons de les opposer et considérons que les acteurs respectifs partagent la responsabilité d’actions thérapeutiques conjointes. Le soin s’est progressivement déplacé du médecin vers le prescripteur. Ce n’est pas le diagnostic qui gêne le kinésithérapeute, mais bien le sésame que représente la prescription, véritable autorisation d’intervenir.

Partenaires, mais pas du même côté de la frontière. On mesure pourquoi le kinésithérapeute, indépendant dans la décision et la réalisation de ses actes, ne demande qu’à la traverser : l’acte de soin ne devrait-il pas, pour certains cas aigus ainsi que lors de la prise en charge des patients atteints de pathologies chroniques, être prescrit par celui qui le réalise ? Puisqu’il se déplace progressivement du médecin prescripteur au kinésithérapeute ! L’accès au DMP complet, pour asseoir le raisonnement du praticien, en est le corolaire.

Comprendre le présent c’est préparer l’avenir. Cet aphorisme illustre ce que la profession est en mesure de proposer : alors que le système de santé doit se réorganiser, des acteurs ne demandent qu’à étendre leurs responsabilités, appuyées sur des compétences qui se sont progressivement élargies.

[1] Séminaire du Haut Conseil pour l'Avenir de l'Assurance Maladie (HCAAM), 12 juin 2019.

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