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BPCO : Comment cibler l'éducation du patient en pratique libérale ? (1ère partie)

Bertrand Selleron
Kinésithér Scient 2014,0559:53-54 - 10/11/2014

Le 17 novembre 2014 aura lieu la journée mondiale contre la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO). Cette maladie essentiellement causée par le tabac est toujours une priorité de Santé publique dans tous les pays industrialisés. En France, la Haute Autorité de Santé (HAS) a récemment mis au point différents outils pour améliorer le parcours de soin, notamment la mise en œuvre de la réhabilitation respiratoire [1].

L’éducation thérapeutique du patient BPCO est un axe fondamental du traitement de cette maladie chronique qui repose sur l’autogestion. Mais comment cibler l’éducation du patient BPCO ? Quelles sont les priorités et qu’est-ce qui peut être abordé dans un second temps ? Quels supports pédagogiques utiliser ? Nous proposons dans cet article de cibler les objectifs éducatifs prioritaires qu’un kinésithérapeute peut facilement et progressivement aborder aux cours de séances individuelles ou collectives.

L’autogestion d’une maladie chronique nécessite d’adopter des conduites particulières qui peuvent nécessiter des changements de comportements par rapport aux habitudes. Pour le kinésithérapeute, avoir une attitude éducative commence par permettre au patient d’exprimer son point de vue, ses connaissances et ses représentations mentales. Il est donc indispensable de commencer par poser des questions, toujours ouvertes (c’est-à-dire n’amenant pas de réponse par oui ou par non), et d’exploiter les réponses, plutôt que de donner des conseils. Nous proposons pour chacun des axes ciblés, une série de questions types, basées sur le programme « Mieux vivre avec une MPOC » [2-4].

Comprendre la maladie et l'importance de changer certains comportements

Tout d’abord, il est nécessaire de déterminer avec le patient ce qu’est être en bonne santé pour lui, et plus particulièrement avec une BPCO : « Que signifie être en bonne santé pour vous, malgré votre BPCO ? », « Que faites-vous pour rester en bonne santé ? ».

Puis, une série de questions vont permettre de préciser les connaissances du patient sur l’autogestion de la maladie au niveau du traitement médicamenteux :

- « Pourquoi devez-vous prendre vos médicaments ? » ;
- « Comment ces médicaments peuvent-ils vous aider ? » ;
- « À quelle fréquence prenez-vous ces médicaments ? » ;
- « La prise de ces médicaments vous pose-t-elle des problèmes ? ».

Éviter l'exposition aux facteurs d'exacerbation

De nombreux facteurs peuvent aggraver les symptômes d’une BPCO et conduire à une exacerbation : la fumée de tabac si le patient n’est pas complètement sevré, la pollution de l’air intérieur et de l’air extérieur, une température extérieure basse ou trop élevée, la pluie, le brouillard, un entourage enrhumé ou grippé (fig. 1).

Figure 1
Toux, éternuments... exacerbation ?

L’entretien peut être engagé en posant les questions suivantes [2] :

- « Dans votre cas, quels sont les facteurs qui peuvent aggraver les symptômes de votre BPCO ? » ;
- « Comment pouvez-vous éviter ou réduire l’exposition à ces facteurs ? » ;
- « Pensez-vous être capable de demander à votre entourage de ne pas fumer en votre présence ? » ;
- « Pouvez-vous donner un exemple d’une situation récente où vous avez pu éviter l’exposition à un facteur d’aggravation de vos symptômes ? ».

Cette série de questions suit une progression en termes d’acquisition des compétences. Néanmoins, le problème du tabagisme du patient est volontairement survolé à cette étape car il s’agit surtout d’une addiction qui doit faire l’objet d’une prise en charge spécifique.

Comprendre l'intérêt du traitement de fond et des traitements de crise

À cette étape, les questions sur le traitement médicamenteux deviennent plus précises. Il s’agit d’approfondir les représentations sur les effets bénéfiques et indésirables de chacun des médicaments, mais aussi sur la posologie (fig. 2).

Figure 2
Traitement de fond ou traitement de crise :
quelles différences ?

- « Pouvez-vous me donner le nom de chacun des médicaments que vous utilisez pour soigner votre BPCO ? » ;
- « En quoi, ou sur quoi, ces médicaments agissent ? » ;
- « Quels sont les autres médicaments que vous prenez ? » ;
- « Avez-vous des difficultés à prendre régulièrement certains de ces médicaments ? » ;
- « Quelles doses prenez-vous chaque jour ? » ;
- « Est-ce que la prise de certains médicaments vous inquiète ? » ;
- « Pensez-vous que ces médicaments peuvent stabiliser ou améliorer votre BPCO ? ».

Certaines de ces questions seront à renouveler pour chacun des médicaments cités, en précisant si nécessaire s’ils relèvent ou non du traitement de la BPCO.

Reconnaître les symptômes annonçant une exacerbation

« Je suis plus essoufflé que d’habitude » ; « Ma respiration devient pénible et sifflante » ; « Je tousse et/ou je crache plus que d’habitude » ; « J’ai plus de mal à cracher que d’habitude » ; « Mes crachats ont changé d’aspects » ; « J’ai de la fièvre » ; « Je me sens courbaturé »... Autant d’expressions des patients que nous avons déjà entendu au moment où les symptômes se manifestent, ou bien après qu’ils soient survenus.

Mais à distance d’une période d’exacerbation, que sait un patient BPCO de ces signes annonciateurs ? Voici donc une série de questions pour l’aider à exprimer ce qu’il sait : « Pouvez-vous exprimer ce qui caractérise pour vous les différents états : « Je me sens bien », « Je me sens moins bien », « Je me sens beaucoup moins bien », « Je pense que ma vie est en danger » ?

Suite et bibliographie dans notre prochain numéro

© B. Selleron


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